Stephen Harper aurait bien dû nous dire la vérité sur les F-35.
On l'aurait cru et il ne serait pas dans le grave pétrin qu'il connait aujourd'hui en train de plonger dans les sondages comme un huard dans un lac.
Le problème a commencé lors de la campagne électorale du printemps dernier.
Il nous a dit que ses 65 avions de chasse F-35 de Lockheed Martin ne coûteraient pas plus que 15 milliards $ -- pas une cent de plus.
Ce n'était pas vrai!
On sait maintenant que Harper avait déjà entre ses mains des documents du ministère de la défense nationale qui l'informaient que les coûts avaient passé de 15 milliards $ à 25 milliards $. Son ministre de la défense Peter MacKay avait les mêmes documents entre ses mains.
Et pourtant, Harper et MacKay et tous les autres ministres de son gouvernement se promenaient en répétant sans cesse comme des perroquets « 15 milliards, 15 milliards, 15 milliards ».
Les militaires, qui savaient que le chiffre était faux, restaient muets.
Quand l'Officier parlementaire du budget, Kevin Page, un homme digne et indépendant, a osé réfuter le « 15 milliards », Harper a sauté sur lui à deux pieds.
Et quand le Vérificateur-général, Michael Ferguson, digne successeur à l'honorable et compétente Sheila Fraser, a également contredit les faux chiffres de Harper, lui aussi y a goûter.
Quand Lockheed-Martin a annoncé publiquement les bons chiffres, Harper et les siens sont restés muets, plutôt que démentir les chiffres du manufacturier.
Quant aux huit autres pays alliés au Canada, qui eux aussi avaient dit oui à l'achat du F-35 avant que le coût grimpe en flèche, un après l'autre a fait des « ajustements » comme ils préféraient dire.
Certains, tel que le gouvernement américain, ont réduits leurs commandes. D'autres ont remis à plus tard une partie de leurs commandes.
D'autres encore, tel que la Grande-Bretagne, ont choisi d'éliminer les bébelles et le « chromé » sur leurs commandes de F-35.
Et Harper lui? Il continuait à dire à tout le monde que ses F-35 ne coûteraient pas plus que 15 milliards $. Les monde militaire entier se tordait de rire, ou de pleurer pour les pauvres Canadiens.
« C'est le froid là-bas, qui le fait parler comme ça, » disaient certain Européens.
Quant à Lockheed-Martin, la compagnie ne disait pas un mot, de peur de perdre le contrat, se disant qu'éventuellement Harper admettra lorsqu'il ne sera plus au pouvoir, que le prix avait changé en 2010.
Quant au reste du monde, des observateurs dans les pays alliés, certains se demandaient si Harper est « tout-là. »
Cette semaine Harper, qui nie toujours que son chiffre était erronée, veut nous faire croire que c'était tout simplement « une erreur de comptabilité » de la part de ses militaires, ou du Vérificateur Ferguson, ou de l'officier du budget Kevin Page, et que lui, Stephen Harper, premier ministre de tous les Canadas, avait raison, comme il a toujours raison.
À sa façon, bien sûr.